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Le généraliste, une espèce en voie de disparition

Prévention & Actions Sociales | Publié le 24 juin 2024

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Entre un médecin généraliste qui exerce dans un désert médical et un médecin du centre-ville d’une métropole, la pratique est bien différente. Quand les hôpitaux sont à plus d’une demi-heure de route, quand les spécialistes à qui adresser les patients sont rares et débordés, quand il faut faire des gardes, ce n’est pas une sinécure. Explications avec Yves Marchandy, médecin généraliste à Riez, dans les Alpes-de-Haute-Provence.

J’ai 1930 patients dans ma file active de médecin traitant, je travaille de 60 à 110 heures par semaine, je fais 74 gardes de nuit sur mon secteur par an.» Voilà le tableau que brosse le Dr Yves Marchandy, 57 ans. Son collègue en a 65 et tous deux viennent de recruter une jeune collègue de... 40 ans! Un petit miracle tant la population de généralistes s’est réduite comme peau de chagrin. La faute au vieillissement des praticiens, qui partent un à un en retraite, au numerus clausus, à la féminisation du métier qui ne va pas dans le sens d’installations dans les régions reculées.


«Les jeunes veulent travailler moins et gagner plus, estime le Dr Marchandy, ils ne veulent pas faire de garde; ils ne veulent pas travailler isolé. Ils préfèrent travailler dans les maisons de santé de mairie ou de mutuelle.» Ce en quoi le docteur leur donne raison. À Riez, le trio mutualise le cabinet et une secrétaire médicale. Malgré la charge de travail, leur réunion hebdomadaire est maintenue, car nécessaire, ainsi qu’une réunion mensuelle avec les infirmières: «Cela permet d’avoir une approche globale.» Et de mieux encaisser des conditions d’exercice où le stress et les responsabilités ont de quoi décourager si on n’a pas la foi.

 

Seuls au milieu de nulle part


«Nous exerçons dans une zone sous-dotée. L’hôpital le plus proche est à 40 kilomètres. Il est régulé la nuit, ce qui signifie qu’il faut aller à une heure et demie/deux heures d’ici. Il ne reste que 2 pneumologues» et le reste est à l’avenant. Résultat: des retards énormes dans la prise en charge, des arrêts de travail prolongés faute d’examens par le spécialiste.
Les téléconsultations ont aussi une incidence sur la pratique des généralistes: «On voit des patients revenir avec des pathologies aggravées parce qu’elles n’ont pas été diagnostiquées en téléconsultation.»
Les déserts médicaux coûtent plus cher à la Sécurité sociale. Il faut aussi compter avec les trajets en ambulance qui s’élèvent vite à 200 euros en raison des distances dans la région pour trouver un spécialiste ou un hôpital. S’il faut aller à Marseille, c’est 500 euros. «Il n’y a qu’une ambulance. Si j’envoie l’ambulance, il faut que je calcule quand elle sera de retour. Si j’ai un besoin pour un autre patient, je devrais solliciter les pompiers. On a ce genre d’arbitrage à faire avec le Samu.»

 

Un métier “prenant”, le mot est faible

Au préalable, le Dr Marchandy aura fait jouer son réseau pour que son patient soit accueilli dans le bon service en passant quelques coups de fil à des confrères.
À ce rôle de coordinateur des soins s’ajoutent les rendez-vous non programmés qui viennent s’intercaler entre deux rendez-vous prévus, une heure à une heure et demie chaque jour pour gérer l’administratif avec 195 caisses primaires et 275 mutuelles, et le temps consacré à des jeunes qui se forment puisque le docteur est aussi maître de stage. Le tout en conservant du temps avec chaque patient pour ne pas faire de l’abattage. Pas étonnant que les généralistes en milieu “sous-doté” soient sujets au burn-out. Ce sont en tout cas des bourreaux de travail. Généralistes, ce n’est pas une sinécure.

 

PARCOURS ET REPÈRES
Diplôme: bac + 9 qui débouche sur un diplôme d’État, obligatoire pour exercer.
Nombre de praticiens concernés: 102000 médecins généralistes en France.
Profil: 1 médecin sur 2 a plus de 60 ans, 49,38 % des généralistes sont des femmes.
Salaire: 4500 euros bruts par mois pour un débutant.
Secteur: remplacement, cabinet, hôpital, ou médecine du travail/scolaire. Beaucoup de praticiens mixtes, libéral et salarié.

 

UN RÔLE SOCIAL PEU VALORISÉ


Porte d’entrée dans le parcours de soins, mais aussi pour les dépistages, pour la prévention, le généraliste joue un rôle à la fois sanitaire et social. Pour le Dr Marchandy, la suppression de l’aide médicale de l'État, «c’est une faute épidémiologique! Les bénéficiaires de l’Aide Médicale de l’État sont des personnes qu’il faut au contraire suivre, qui ont un taux de morbidité élevé, des risques accrus de maladie, de complications. On essaie de faire des économies mais ça va coûter cher». Les franchises médicales? La taxe “lapin” pour les rendez-vous non honorés? «J’ai des gens qui sont à la CMU; j’ai des patients atteints de tumeurs ou des petites mamies qui ont Alzheimer: les franchises sont pour les uns un frein à l’accès au soin, pour les autres une mesure inefficace.»

 

Source Article Bonne Santé Mutualiste #104


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